• Elise Duclos, Orhan Pamuk et la littérature mondiale, Paris, Petra, 2017, 386 p. 
ISBN : 9782847431872  
                  
                  	                   	
                  	En l'espace de trois décennies, Orhan Pamuk s'est imposé comme un écrivain incontournable de la littérature mondiale. Auteur de bestsellers dont les sorties sont des événements éditoriaux, traduit dans plus de 70 langues, il occupe régulièrement l'actualité littérature et culturelle occidentale. Comment un auteur, qui commence à écrire au milieu des années 1970 dans un pays du Tiers-monde, dans une langue à très faible pénétration sur le marché littéraire occidental et européen, issu d'une petite culture littéraire sans grand prestige ni ancienneté, parvient-il à gagner le centre du système littéraire et à conquérir toutes les places fortes de la consécration et de la reconnaissance occidentales? 
 
C'est à cette question que le livre tente de répondre. Examiner le rapport d'Orhan Pamuk à la littérature mondiale, c'est mettre au jour les stratégies d'un auteur excentré qui conduisent ce fils de la bourgeoisie kémaliste féru de littérature moderne à devenir une superstar de la République mondiale des lettres, au même titre que Salman Rushdie ou Umberto Eco. Tandis que la première partie replace Orhan Pamuk dans l'espace hiérarchique et inégal de la littérature mondiale et s'intéresse à l'héritage culturel, historique et littéraire du romancier, la deuxième partie examine son rapport au canon occidental. Toute l'ingéniosité de cet auteur réside dans une stratégie littéraire qui est à la fois stratégie d'auteur et stratégie d'écriture : si l'héritage du mimétisme et du provincialisme turcs est transformé en dotation maximale pour pénétrer l'espace mondial de littérature, la mise en place d'une poétique de la taklit permet de conjurer l'angoisse de l'influence et de l'excentricité en une nouvelle catharsis romanesque de laquelle émerge la fiction de l'auteur pamukien. 
 
Ancienne élève de l'École normale supérieure et agrégée de lettres modernes, Élise Duclos est docteure en littérature comparée de l'université Paris Nanterre. Ses recherches actuelles portent sur l'histoire mondiale du roman et sur la réception de la littérature européenne et occidentale en Turquie. 
  
 
 
 
Sommaire:  
Introduction 
PREMIÈRE PARTIE 
De la périphérie à la littérature mondiale : stratégies d’un auteur excentré 
1. L’héritage d’Orhan Pamuk ou la « conscience malheureuse de l’intellectuel turc » 
A. Le complexe de la taklitçilik 
L’invention mimétique de la modernité turque 
Domination, hégémonie, dépendance coloniale : quel modèle pour penser les rapports avec l’Europe ? 
« Angoisse de l’influence » de la littérature turque 
B. Le complexe de la ta?ral?l?k 
Une ferveur francophile…  
… au coût narcissique élevé 
Les « intrus au spectacle de la modernité » : le champ littéraire turc dans la littérature mondiale 
Le roman, un genre étranger 
C. Orhan Pamuk et le « destin historique » des lettres turques 
Loin du centre : l’ethos extra-européen d’Orhan Pamuk 
« La valise de mon père » ou la vénération de la littérature européenne en héritage 
À l’extérieur de la bibliothèque européenne occidentale 
2. Consécration, institutionnalisation, globalisation : la trajectoire d’un auteur turc dans la littérature mondiale  
A. 1980-2000 : la trajectoire de Pamuk dans le champ littéraire turc 
Ethos de la bourgeoisie laïque dans la Turquie des années 1950-1960 
La revendication d’une position autonome dans le champ littéraire : un ethos occidental 
La conquête de la reconnaissance littéraire dans l’espace national  
Traductions européennes et prix littéraires : la conquête de la légitimité dans le système mondial 
B. Mondialisation et médiatisation : de l’écrivain turc cosmopolite à l’auteur global 
Médiatisation, mondialisation, globalisation d’Orhan Pamuk 
Le champ littéraire à l’ère du capitalisme global : l’ère du soupçon ? 
C. Vers la littérature mondiale : élaboration et réajustement de la figure de l’auteur 
Effacement des maîtres turcs 
Une posture de grand lecteur de la bibliothèque occidentale 
Le domaine français 
Le domaine russe 
Le domaine anglophone 
Le domaine germanophone 
Le domaine hispanophone 
DEUXIÈME PARTIE 
Orhan Pamuk et le canon occidental : stratégies d’écriture 
3. Une poétique intertextuelle 
A. Réécriture de Thomas Mann 
Cevdet bey et ses fils : roman des origines et origine du roman pamukien 
La saga des Buddenbrook et des I??kç? (Cevdet bey)  
Les signes du déclin : histoire de la désagrégation d’une famille 
B. Réécritures proustiennes  
La (non)-réception de Proust dans la littérature turque 
Le Château blanc : « mistranslation » proustienne 
Les « madeleines » des romans d’Orhan Pamuk 
Le Livre noir, le livre de la mémoire et de l’oubli 
Le Livre noir : « Mademoiselle Albertine gitti ! » 
C. Pratique intertextuelle et jeux postmodernes 
SIGNALISATIONS DE DANTE 
De la Vita Nuova à Yeni Hayat 
Le Livre noir ou l’enfer pamukien 
LE CANON OCCIDENTAL ET LA SÉMIOSE PROLIFÉRANTE DU LIVRE NOIR 
Le canon de la littérature européenne et occidentale dans le rhizome du texte 
Orientalisation du canon occidental 
CONCLUSION : POLITIQUE DU CANON OCCIDENTAL 
4. Dostoïevski ou le maître russe de Pamuk  
A. Au miroir russe 
B. Le roman comme théâtre idéologique de la modernité 
LE PERSONNEL ROMANESQUE DES OCCIDENTALISTES 
La condition de l’intellectuel turc occidentalisé 
Fanatisme occidentaliste et dialogisme romanesque 
« [Nos] fins étant bonnes… » : l’occidentaliste ou la légitimation de la violence 
LE PERSONNEL ROMANESQUE ANTI-OCCIDENTAL 
« Humiliés et offensés » 
Le destin libidinal de l’humiliation, entre millet et cemaat 
L’imaginaire messianique du sauveur entre mythification et mystification : « Nous l’attendons, tous » 
Le Dr Lefin entre délire paranoïaque et exaltation mégalomaniaque 
5. Mimétisme et hantise de l’Autre : de l’angoisse de l’influence à une poétique de la taklit 
A. La poétisation d’un dilemme historique : l’autre et le mimétisme 
Un questionnement généralisé 
Le désir mimétique du personnage : être l’Autre 
Mimétisme girardien, mimétisme postcolonial 
De la nostalgie d’un moi « propre » au refus du mimétisme 
« Un pays où tout était plagiat » : poétique du simulacre et de la contrefaçon 
B. La genèse fictionnelle du sujet écrivant 
Prendre la place de l’Autre : le carrousel du roman 
Jeux mimétiques et « feintise ludique » 
Au miroir de la lecture, soi-même comme un autre 
Emprunter, voler, plagier : imitation et création littéraire 
  
Conclusion 
Liste des éditions utilisées 
Index 
 
 
 
                  
                 |